L’exécutif estime qu’un « scénario à la grecque » est possible, après que l’agence de notation Fitch a abaissé la note de la France d’un cran, de AA à AA−. En jeu, les 3 000 milliards de dettes que nous avons à financer.

Radio France – Jean-Rémi Baudot Publié le 01/05/2023 

Vendredi 28 avril, l’agence de notation Fitch a annoncé la baisse de la note de la France. Désormais, la dette française est notée AA−, une nouvelle économique et politique peu réjouissante. En effet, cela sonne comme un avertissement de la part des marchés financiers envers l’exécutif. Le communiqué publié vendredi est clair : en plus des « mouvements sociaux (parfois violents) » évoqués par Fitch, l’agence pointe du doigt une « impasse politique » qui pèsera sur la capacité de la France à réduire son déficit et sa dette.

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Face à cela, le gouvernement a tenté de rassurer les marchés. Bruno Le Maire a affirmé sa volonté de « faire passer des réformes structurantes »Cependant, Fitch souligne que le gouvernement n’a pas réussi à faire accepter ces réformes et que le contexte actuel nuit à notre crédibilité pour mener de futures réformes. Cette mention de « l’impasse politique » est presque plus grave que la note elle-même. Cela met en lumière la réalité : la Macronie ne dispose plus d’une grande marge de manœuvre, même les marchés le savent.

La crainte d’un « scénario à la grecque »

Il ne faut pas prendre à la légère les 3 000 milliards de dettes que nous avons à financer. Même si l’on peut avoir des opinions divergentes sur le système financier, personne ne devrait prendre ces chiffres ni cet avertissement à la légère.

Quelles conséquences pour la France ? Pas de panique pour l’instant. Les investisseurs continuent de rechercher la dette française. Cela fait dix ans que la France a perdu son prestigieux triple A, mais la finance et la politique sont parfois une question de dynamique. Si demain, nos créanciers doutent, ils demanderont plus de garanties. La crainte d’être lâché par les marchés est réelle. La Première ministre, Élisabeth Borne nous avouait récemment : « Un scénario à la grecque est possible. Si on dit qu’on se fiche des réformes, ça peut nous arriver. » 

La hausse des taux a déjà commencé, et l’exécutif a des sueurs froides. Mais ce serait la faute des marchés ? Facile à dire. La réalité, c’est que pendant le Covid, le « quoi qu’il en coûte » a sauvé notre tissu productif, à grands coups de milliards. C’était coûteux, mais nécessaire. Sauf que l’exécutif a voulu faire croire que cette dette se rembourserait par le seul mécanisme de la croissance. À ne pas vouloir parler des chiffres, à ne pas sensibiliser les Français aux effets de l’endettement, à une nécessaire rigueur, c’est comme pour les retraites, on prend le risque de perdre le contrôle.

En janvier 2019, Emmanuel Macron s’était invité à un « grand débat » à Bourg-de-Péage dans la Drôme. Ce soir-là, au milieu de citoyens, le président avait lancé : « La vraie réforme, elle va avec la contrainte. Comment on finance ? Ce n’est pas open-bar. Le bar, c’est le nôtre ». À l’époque, tout le monde avait ri. Avec le recul, on peut se demander si l’ivresse des « gilets jaunes » et du « quoi qu’il en coûte » n’a pas fait oublier au gouvernement qu’il fallait rappeler aux Français la recette du cocktail et que les videurs du bar sont les marchés financiers.