ADELINE LORENCE Publié le 16/03/2021 à 17h00

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L’Agirc-Arrco enregistre en 2020 un déficit technique provisoire de 6 milliards d’euros. Le poids de la crise financière pèse lourdement sur le régime complémentaire de retraite des salariés du privé.

L’embellie aura été de courte durée. Alors qu’en 2019 le régime complémentaire des salariés du privé présentait un résultat technique en excédent de 237 millions, les chiffres sont déficitaires en 2020. D’après les résultats provisoires présentés ce mardi 16 mars, le résultat technique (*) est en déficit de 6 milliards. La principale explication est à chercher du côté des ressources. Elles s’élèvent à 79,4 milliards d’euros, soit un recul de 4,7% par rapport à 2019. Elles sont constituées principalement des cotisations perçues qui représentent en 2020, 75 milliards d’euros. “Les cotisations du régime ont diminué de 5,5% par rapport à 2019. Un recul qui est le résultat de la baisse de la masse salariale sur laquelle sont assises les cotisations du régime”, détaille Gaëlle Piadé, directrice financière de l’Agirc-Arrco.

Les chiffres sont historiques. 8,8 millions de salariés ont été en activité partielle au moins une fois au cours de l’année 2020. Or, pendant cette période, leurs droits ont été maintenus alors qu’ils ne cotisaient pas pour leur retraite. Ce boom de l’activité partielle a nécessité un effort de 4 milliards d’euros de la caisse. Du côté des cotisations entreprises, en raison des reports de paiement, ce sont 400 millions d’euros qui n’ont pas été encaissés par l’Agirc-Arrco. A cela s’ajoute les aides de solidarité exceptionnelles versées par le régime à 100.000 cotisants, soit 100 millions d’euros.

De l’autre côté de la balance, les charges sont en augmentation de 2,8% et atteignent 85,4 milliards d’euros. Elles proviennent principalement du versement des pensions qui représente 82,4 milliards d’euros, soit une progression de 1,9% par rapport à 2019. Le rapport entre les ressources et les charges redevient donc négatif et dans une proportion importante. Si l’on ajoute le résultat provisoire financier en 2020 qui atteint 1,2 milliard d’euros, le résultat provisoire global de l’exercice 2020 est en déficit de 4,8 milliards. “Jamais nous n’avons connu une situation telle que celle que nous connaissons mais ce n’est pas un record historique, rappelle Didier Weckner, président (Medef) de l’Agirc-Arrco. Malgré une crise historique le déficit est maîtrisé”.

Cette situation exceptionnelle a également pesé sur le niveau des réserves mais dans une moindre mesure. Alors qu’elles s’élevaient à 65,58 milliards d’euros au 31 décembre 2019, un an plus tard, elles sont de 61,66 milliards d’euros. “Ce chiffre reflète la situation robuste du régime et la performance financière positive des marchés, estime la directrice financière. Elles représentent neuf mois d’allocation d’avance s’il n’y avait aucune entrée de cotisations”. En parallèle, l’Agirc-Arrco continue les économies de coût de gestion. Elles représentent à fin 2020, 700 millions d’euros en 8 ans.

Pour l’avenir, les projections financières restent étroitement liées à la crise sanitaire. “Nous ne devrions pas retrouver en 2021 les 4 milliards d’euros dépensés en raison de l’activité partielle”, espère Didier Weckner qui table sur un résultat technique meilleur dans les prochaines années avec un déficit technique entre 3 et 4 milliards d’euros. “Une partie de ce déficit va se résorber à court terme mais une autre partie sera le reflet de l’économie française et de son potentiel de croissance”, prévoit François-Xavier Selleret, directeur général de l’Agirc-Arrco.

Si les prévisions pour 2021 sont plus qu’incertaines, elles interrogent sur les mesures que pourraient être amenées à prendre les syndicats et le patronat, gestionnaire du régime, pour permettre un retour à l’équilibre et maintenir sur 15 ans un niveau de réserves suffisant pour assurer 6 mois de versement de pension. “Ce serait une erreur tactique de gérer à court terme les résultats actuels, prévient Brigitte Pisa, vice-présidente (CFDT) de l’Agirc-Arrco. Il n’y a pas de calendrier immédiat de rencontre entre les partenaires sociaux pour corriger un éventuel déficit car la situation en 2021 va encore évoluer. On pourrait décider de se recroiser à l’automne pour voir ensemble si nous devons prendre des mesures”, envisage-t-elle. Il n’y a donc pas le feu à la maison Agirc-Arrco, mais les partenaires sociaux ne savent pas encore s’ils pourront éviter de prendre des mesures impopulaires ayant des répercussions pour les retraités comme les actifs. Ils pourraient décider de remettre sur la table des mesures déjà utilisées dans le passé comme un gel des pensions, un rehaussement des cotisations ou encore des incitations à travailler plus longtemps sous la forme d’un bonus/malus. Mais pour le moment, l’urgence est d’attendre.

* Soit la différence entre les ressources et les charges hors résultats financiers.